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Mesdames, Messieurs, chers amis, chers
camarades, Ce qui
nous réunit, aujourd'hui, est en relation étroite avec les événements qui
furent à l'origine de ce monument de la Fédération, érigé en 1894, et qui voulait commémorer les révolutionnaires qui s'assemblèrent, ici même,
en 1790, pour jeter les bases de ce que l'histoire a retenu sous le nom de Fédération
bretonne–angevine de Pontivy. 1790, 1894, 2001 : des situations
apparentées.
Le
point commun entre notre réunion de ce 4 mars 2001 et les événements de 1790
comme ceux de 1894, c'est que ces dates se caractérisent par des situations
singulièrement apparentées.
— En premier lieu dans ces 3
périodes il s'agit de réaffirmer
et de consolider l'unité de la Nation française forgée en 1790, qui a pris
rapidement, dès 1792, la forme de l'unité et de l'indivisibilité de la République
matérialisée en 1894 par le Monument de la Fédération, caractéristiques
qui, en cette année 2001, restent d'une essentielle actualité ;
— En second lieu, dans
chacun des cas, il s'agit de la défense des valeurs et des acquis, que la réalisation
du point précédent avait permis. A savoir, les Droits de l'Homme et du
Citoyen, les droits, règlements et institutions identiques pour tous, sur tout
le territoire. Ce
n'est donc nullement le hasard si le monument de la Fédération de Pontivy
porte, gravé dans la pierre, afin de lui consacrer la pérennité dans le temps
:
— d'une part l'affirmation
du Pacte d'union, selon laquelle : «n'étant
ni Bretons, ni Angevins, mais Français et Citoyens du même empire,(comprenons
d'un même pays) nous
renonçons à tous nos privilèges locaux et particuliers» ; — et d'autre part, tant dans le Pacte d'Union de février que dans le Serment des jeunes volontaires de janvier, la résolution selon laquelle : «nous jurons de
combattre les ennemis de la Révolution, de maintenir les Droits de l'Homme et
du Citoyen» Droits
de l'Homme et du Citoyen qui s'étaient
substitués au régime des Communautés, qui, depuis des siècles, avait été
la marque de l'Ancien Régime de droit divin . Le statuaire, les a représentés,
comme l'histoire l'a retenu, ici comme ailleurs, sous la forme bien connue des nouvelles tables de la loi,
substituées à celles des commandements divins qui n'avaient plus cours, aux
yeux des hommes et des femmes, décidés à combattre pour leur bonheur sur la
terre, au lieu d'attendre, comme les tenants de l'ancien ordre le leur
dictaient, un hypothétique bonheur, au ciel, post mortem, comme on dit. Se ressourcer aux origines de la Révolution.
A un siècle de distance, en 1894, les héritiers des Fédérés
bretons-angevins de 1790, dans une situation où la République était encore
fragile, par la menace de coup d'Etat militaire, incarnée un temps par le Général
Boulanger ; par les crises affairistes telle celle de Panama ; par les menées
royalistes que le Ralliement du pape Léon XIII en 1892 n'avait que faiblement
atténuées ; par l'affaire Dreyfus ravivant l'antisémitisme des nostalgiques
de l'ordre ancien ;...pour ces raisons et d'autres, les Républicains de cette
fin de siècle, par un judicieux retour aux sources, érigeaient, à la gloire
de la Révolution, ce grandiose monument de la Fédération, oeuvre de
l'architecte de Perthes, et pour lequel les fonds furent recueillis de l'Etat,
de la ville de Paris et de presque toutes les villes de Bretagne. Se
régénérant véritablement, aux origines mêmes de la Révolution, pour
trouver l'énergie nécessaire, à la consolidation de la République menacée. Et aujourd'hui,
à environ un autre siècle de distance, ce
qui motive la présente commémoration
de ces événements qui jetèrent les base de l'unité et de l'indivisibilité
de la République et de ses acquis, que des décennies de luttes ont permis de
consolider, dans la foulée des serments de 1790, c'est que les périls, tant
sur l'unité de la République que sur les acquis républicains qui lui sont inhérents,
suscitent, à cette heure, les plus vives inquiétudes. C'est
la langue française, comme langue de la République de tous les Français, qui
est dans le collimateur ; ce sont les communes, les départements que les Révolutionnaires
avaient créés comme cellules de base de la démocratie, mais qui devraient
disparaître sur injonction de Bruxelles ; ce sont les services publics jetés
en pâture aux agioteurs, aux accapareurs, aux affairistes des multinationales
ou de la Banque mondiale, pour reprendre ces appellations qui n'ont de vieillot
que le vocabulaire.... Trois
dates 1790, 1894, 2001, où, pour schématiser, les mêmes causes appellent les
mêmes réactions. 1938 : la Liberté dynamitée.
Il est
une autre date,
qui a laissé sa marque, disons en creux, en négatif, sur les événements que
nous évoquons, c'est l'attentat de la nuit du 17-18 décembre 1938, perpétré par les autonomistes bretons contre ce
monument, et qui à défaut de pouvoir ébranler la colonne de granit, a fait
disparaître la statue de bronze accolée sur le fût. Ils
s'en sont pris, comme les adversaires de la Révolution en 1790, comme ceux qui
voulaient en découdre dans les années 1894 avec la Gueuse, comme ceux qui
aujourd'hui poursuivent de leur haine les Jacobins de 1789 dont les premiers
furent les députés bretons des Etats Généraux,...ils s'en sont pris à cette
allégorie de la Liberté sous la forme, telle qu'on peut encore le voir sur les
anciennes photographies, d'une jeune femme se libérant du suaire qui, pendant
des siècles de servitude et d'oppression, l'avait privée de la lumière du
jour, et tendant de l'autre main, le rameau d'olivier, qui a toujours, depuis
l'Antiquité, pour tous les pays et les peuples, associé la Liberté et la
Paix, l'un n'allant pas sans l'autre. Et
l'on sait que les vieux démons, aujourd'hui réapparaissent, dans une
troublante continuité et une filiation de pensée avec les événements de 1938
et les années de collaboration qui ont suivi peu après. |
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